• ARIA (extraits)

    Aria revient sur le lieu de son enfance, - le Pedregulho - où une conférence doit avoir lieu pour décider de la restauration du bâtiment qui, au fil du temps, s’est considérablement délabré. Aria ne participe pas aux débats ; elle est embauchée comme hôtesse d’accueil. Pour combler son ennui, elle se plonge dans les méandres de son imaginaire et de ses fantasmes à la teneur océanique où elle se voit nager au beau milieu des cnidaires et des nudibranches qui font office d’écran devant l’horreur grisonnante de cette masse de béton. Rétive, et solitaire, Aria s’invente au travers des grandes baies vitrées des salles et des couloirs, les tombes des plus grands architectes du XXème siècle.

     

    ARIA  (extraits)

    Les tombes des Architectes 

    Page 71/§ 1

    Apartamento N°375 

    A contre jour au milieu d’un groupe clairsemé de passagers, déboucha la silhouette frêle d'Aria. A peine sortie de son coma naturel, et abrutie par la surpopulation souterraine du métro de Rio, Aria emprunta le vaste trottoir vide  qui se déroulait devant elle, tout inondé de Lumière. La jeune femme revenait sur les lieux de son enfance, le Pedregulho, vaste complexe architectural, où devait se tenir un symposium pour lequel Aria avait été recrutée comme hôtesse d’accueil. Aujourd’hui, la jeune femme de 28 ans venait d’emménager dans le centre de Rio sur l’Avenue de l’Atlantique face à la célèbre plage de Copacabana. Le soleil à l'horizon, d'un blanc aveuglant, commençait en effet à prendre ses aises au milieu de ce frétillement urbain matinal incarné en grande partie par la course effrénée des voitures. Aria se dirigea vers ce complexe qu’elle n’avait pas revu depuis de nombreuses années..... 

     

    A R I A  (extraits)

    La façade de Pédrégulho

    Page 74/§ 6

    Dans cet espace vide, de grandes baies vitrées donnaient sur le panorama confiné d’un cimetière. Les tombes de  Walter Gropius, Frank Loyd Wright , Jean Nouvel, Norman Foster, Zahah Hadid  mais aussi  de Affonso Reidy et Le Corbusier,  étaient enchevêtrées comme des ronces. Avec l’illusion de la distance, la jeune fille avait l’impression qu’un simple mouvement de sa main suffirait à balayer toutes ces petites dalles de Lego où les morts s’y étaient retranchés pour l’éternité. Des arbres d’un vert lumineux scandaient les allées de cette maison des morts. Aria aurait pu scruter pendant des heures ces alignements de tombes. Une variété de fleurs, notes colorées dans cette étendue macabre, scintillait sous les rayons d’un soleil imperceptible. Dans cette blancheur aveuglante causée par la couleur des murs, Aria avait l’impression d’être un animal, un cerbère, la gardienne d’un lieu invisible.....

     

    Page 147/§ 3

    C'est alors qu'elle entendit à nouveau  des sons étranges de basses fréquences; les mêmes que ceux entendus la veille dans la cage d'escalier. Ils venaient cette fois de l'intérieur. Ces sonorités énigmatiques s'apparentaient au bruit des roulements d'aspirateurs. Elle tourna la tête en direction de son nouveau collègue pour l'interroger du regard, mais le robot ne bougeait pas, hypnotisé par sa lecture. Cette réunion entre deux êtres aphones emmurés dans leur solitude respective était pathétique. C'était comme s'ils ne parlaient pas la même langue ou qu'ils appartenaient à des univers clos repliés sur eux-mêmes comme les circonvolutions d'une coquille de céphalopode ; deux êtres dont les moyens de communication étaient impossibles à établir. Pour elle, ils ressemblaient à des fils incompatibles posés à même le sol dans cet espace vitreux où des bruits incongrus apparaissaient et s'évanouissaient et où chaque instant passé appesantissait un peu plus l'atmosphère.....


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